L'interview de la semaine : Mohamed Bachtobji

vendredi 03 janvier 2020

Cette semaine, c'est Mohamed Bachtobji qui s'est prêté à notre interview hebdomadaire.

Bonjour, je vais tout d'abord te demander de te présenter brièvement ?

Salut le JDF ! Et bien je suis effectivement né à Dole dans le Jura… Mes parents sont venu habiter ici dans les années 70. Un pur hasard ! Il est vrai que la plupart des familles maghrébines ont tendance à opter pour Paris, Lyon ou Marseille. Mais eux non ! (rires) Ils sont tombés amoureux de la ville de Pasteur ! (rires) Quant au football, mon papa a su me transmettre sa passion car il avait été lui même joueur amateur en Tunisie. Finalement, taper dans le ballon m’a davantage plu que de dévaler les pentes à ski !

Depuis combien d’années es-tu au JDF ?

J’entame ma 5ème année en tant qu’éducateur et j’ai été joueur pendant de nombreuses années.

Donc les gens aujourd'hui te connaissent comme dirigeant du JDF, mais avant ce statut quelle a été ton parcours dans le football ? Comment a commencé cette aventure?

Je me souviens surtout de mon tout premier entraînement au PS Dole Crissey… Je n’avais pas de chaussures de football ! J’ai donc joué avec des chaussures de ville, j’étais recouvert de boue ! (rires) Mais je n’ai pas lâché et j’ai su franchir différents paliers au fil des catégories fréquentées. J’ai touché un peu à tous les postes. Je garde en mémoire la passion des éducateurs qui nous encadraient. Tous ces bénévoles qui nous ont transmis de vraies valeurs.

Mon niveau m’a permis d’intégrer les -15 ans Nationaux au sein du plus grand club de la ville de Dole, à savoir le Jura Dolois Football. J’ai vite été surclassé en -17 ans, puis en CFA2. En parallèle, j’ai intégré les différentes sélections départementales puis régionales. Je me suis fait repérer par l’AS Nançy Lorraine après avoir participé à la Coupe Nationale.  Strasbourg, Sochaux, Auxerre me suivaient mais je n’avais d’yeux que pour Nançy ! Le centre de formation avait une très bonne réputation à la fin des années 90. Beaucoup de jeunes intégraient l’équipe fanion. De plus, en Lorraine ça joue dur, il faut être très athlétique, ça correspondait davantage à mon profil. J’y ai joué deux ans, en U17 Nationaux et en CFA, aux côtés de Youssouf Hadji, Egutu Oliseh, Sofiane Kone, Abdeslam Ouaddou, pour les plus connus.  Les premières semaines ont été compliquées… Mais je suis vite rentré dans l’ambiance du centre de formation.

En quittant mon club formateur j’étais convaincu que si ce n’était pas à Nançy ca serait ailleurs ! Même si personne ne sait de quoi demain est réellement fait… Un agent m’a proposé les représentants d’un club allemand. J’ai donc foncé car je n’avais pas d’autres propositions concrètes ! J’ai donc signé à 19 ans au FC Hombourg. Je me suis retrouvé tout seul dans l’Allemagne profonde. Avec une mentalité vraiment différente d’ici ! Les premiers mois, je ne jouais pas. Au bout de 4 mois, je suis allé voir le coach en lui demandant de me donner ma chance, car je travaillais dur, je ne lâchais rien, mais il ne me faisait pas jouer. Alors je lui ai demandé pourquoi j’avais été recruté ? Le match suivant, il m’a titularisé ! J’ai réalisé une grand prestation. Je n’ai plus quitté l’équipe pendant 3 ans. Nous n’avons pas connu de montée, mais nous avons réalisé de beaux parcours en Coupe d’Allemagne. Il faut savoir que le FC Hombourg est un ancien club de Bundesliga, alors je vous laisse imaginer la ferveur du public même en D3 ! Comme tous les autres clubs d’ailleurs, en Allemagne le football est une religion ! Bien que j’ai souffert au début, j’y ai beaucoup appris. J’y ai adopté une certaine rigueur, une discipline de travail, une autre mentalité, qui m’a peut-être manqué à Nancy. ET PUIS VÎNT LE PSG… Un miracle ! Je ne pensais sincèrement pas revenir en France, car je commençais à me faire un nom en Allemagne. Le Sporting Charleroi en Belgique a également souhaité m’enrôler, via Enzo Scifo qui était l’entraîneur. Il m’a appelé pour réaliser un essai. J’ai joué un match amical avec eux contre Wasquehal. J’ai fait un gros match à l’issue duquel Enzo Scifo m’a dit directement qu’il me prenait ! Malheureusement, il s’est fait virer la semaine suivante ! J’étais anéanti… Finalement, mon agent  m’a orienté vers Luis Fernandez qui entraînait le PSG ! Je l’ai rencontré… Il m’a tout de suite pris à l’essai, et a souhaité me conserver. Il m’a dit que j’intégrais le groupe professionnel et qu’on verrait par la suite ! Tout heureux, aux anges !  Et me voilà lors du premier entraînement au beau milieu des Ronaldinho, Heinze, Létizi, Pochettino, Cristobal… Quel choc ! Je me demandais parfois ce que je faisais là ! (rires) Et puis il m’a convié à un match amical disputé face à l’US Créteil. Je me revois monter dans le bus et m’asseoir à côté de Ronaldinho ! Jérôme Alonzo est devant moi, Frédéric Dehu à côté… Et puis derrière Talal El Karkouri, Gaby Heinze, Francis Llacer, Jérôme Leroy, Fabrice Fiorèse… Au final, j’ai joué vingt minutes, j’étais comme un dingue ! Avec la tenue complète N°11 de José Aloisio car le préparateur n’en avait pas prévu une pour moi ! (rires)

Lors de mon dernier match avec le PSG, je me suis blessé. Une mauvaise entorse qui m’a écarté des terrains pendant 3 mois. Dans la foulée, j’avais été laissé libre par  le PSG, car Vahid Halilhodzic avait fait le ménage. J’étais le plus jeune et je n’avais qu’un an de contrat, je fus donc le premier qu’il n’a pas gardé. D’autres ont suivi comme Hugo Leal, Jérôme Leroy… Je me suis fait soigner sur Paris, et j’ai mis du temps à revenir. J’ai donc cherché un club où je pourrais retrouver toutes mes capacités. J’ai opté pour Noisy-le-Sec en CFA, qui était dirigé par les frères Sandjak. J’y suis resté 4 mois où j’ai vite attiré l’attention de clubs professionnels. J’ai ensuite rejoint LouhansCuiseaux en National. J’y ai disputé plus d’une vingtaine de rencontres, malheureusement j’ai subi plusieurs petites déchirures qui ne m’ont pas permis de réaliser une grande saison. Pour l’anecdote, j’y ai pris le seul carton rouge de ma vie… J’avais commis un tacle assassin sur un certain Franck Ribéry qui jouait à Brest ! Il était déjà très fort… Je suis revenu à Dole où j’ai pu réaliser une année complète en CFA2. J’ai retrouvé mes repères, sans pression.

Après cette année à Dole, Je me rends à Djerba où je signe à l’Espérance de Zarzis, un club du milieu de tableau en D1 locale. J’y réalise une saison extraordinaire. Le coach Abdelhak Benchikha, un algérien, m’emmena avec lui la saison suivante au Club Africain, l’une des plus grandes équipes du pays. C’est le club du peuple, suivi par de nombreux fanatiques ! L’ambiance dans le stade, c’est un truc de fou ! Le coach est arrivé sur la pointe des pieds, alors imaginez moi ! (rires) Je n’avais pas un gros CV, donc la pression était forte. Et pourtant on a remporté le titre de champion ! J’ai réalisé de très bons matches et je me suis mis assez rapidement dans la poche les 30 000 supporters présents à chaque match. Sans prétention aucune, je suis devenu leur chouchou car je leur rappelais Lotfi Mhaissi un défenseur très connu en Tunisie dans les années 80. Il avait réalisé le quadruplé avec le Club Africain. J’ai d’ailleurs eu la chance de le rencontrer à la fin de ma carrière…Il m’a même dit : « Après Mhaissi, il y a Bachtobji ! » Il m’a expliqué que pour lui le Club Africain avait autant de valeur que la sélection nationale tunisienne. Une belle rencontre. Après trois ans passés au club africain, je m’engage avec le club rival de l’espérance Tunis… pari fou ? Passer du Club Africain à l’Espérance Tunis, c’est peu comme passer du PSG à l’OM ! (rires) Malheureusement, je n’y ai pas été titulaire. En fait, j’ai compris que le staff m’avait recruté pour quelque part affaiblir mon précédent club. En effet, j’étais un des rares à savoir défendre face au nigerian Mickaël Eneramo qui était une machine de guerre ! Lors des derbys nos duels étaient âpres. Malgré cela, nous avons empilé les titres. J’ai eu la chance d’évoluer dans deux grands club du patrimoine tunisien. Ce n’était pourtant pas évident car c’était en pleine révolution de jasmin. Je n’oublierai jamais mon expérience vécue en Tunisie, que des bons moments !

Si tu devais décrire le JDF ?

Le JDF est un club ambitieux, convivial, avec un projet bien défini et je dirai que c’est un ensemble de personnes dévouées pour leur club qui espère la réussite du projet et pourquoi pas atteindre un niveau respectable dans toutes les catégories…

Quels sont tes plus beaux souvenirs en tant que footballeur et en tant que dirigeant ?

J’en ai cité déjà deux avec la signature de mon contrat au PSG et mon entrée en jeu face à Créteil ! Mais je peux en ajouter d’autres, comme le titre de champion avec l’équipe CFA. Nous avions une très bonne équipe et très bon coach, Antoine Kombouaré, qui débutait sa carrière à ce poste. Comment ne pas ajouter mon entrée en jeu contre Benfica Lisbonne le 15 avril 2003 . J’avais remplacé Gaby Heinze pour le dernier quart d’heure de jeu. Nous l’avions remporté après la séance des tirs au but. J’avais inscrit le penalty de la victoire ! D’ailleurs, avant d’aller le tirer, Francis Llacer m’a chambré en disant que je n’allais pas le marquer ! (rires) Une pression supplémentaire en plus des 5 000 portugais qui me sifflaient ! (rires) Au final, je l’ai marqué, Fred Dehu m’a félicité, tout comme Didier Domi, Alioune Touré, Jean-Michel Badiane… Luis Fernandez avait voulu me récompenser car je n’avais pas fait une seule entrée en match officiel. Enfin, l’autre grand moment fut lorsque mon papa est venu assister à une séance d’entraînement au Camp des Loges. J’étais si heureux pour lui, l’ouvrier du Jura et ancien joueur, de pouvoir vivre ce moment ensemble… Je nous revois prendre la navette qui mène du parking au terrain. Le hasard fait que nous étions en compagnie de Ronaldinho ! Une fois au terrain, j’ai demandé au coach si mon père pouvait rester en zone presse. Il m’a dit non ! (rires) Mais par contre qu’il assisterait à la séance directement sur le terrain avec nous ! C’est assurément le plus grand souvenir de ma carrière de footballeur. Rendre mon père heureux valait tout l’or du monde ! J’en profite pour remercier Luis Fernandez.

Les souvenirs sont nombreux, mais notamment la victoire du championnat 2008 avec le Club Africain devant 100 000  millle spectateurs et aussi la victoire de la Ligue des Champions 2011 avec  l’espérance de Tunis puis la participation à la Coupe du Monde des Clubs au Japon.

Que penses-tu du club et de son évolution ?

Je pense que le club évolue bien et qu’il doit poursuivre dans cette lignée.

Quels sont tes objectifs avec l’équipe B ?

Aider  les jeunes joueurs à franchir certains paliers et bien sur le maintien après une montée et pourquoi pas une autre accession. On verra…

As-tu d’autres passions que ta discipline sportive ?

Boxe, crossfeat…

 

Si tu étais…

Un pays ?  Tunisie

Une ville ? Paris

Un numéro / Un chiffre : 5

Un animal ? Lion

 

Tes préférences et tes goûts :

Un joueur ?  Ronaldhino

Un sportif ? Carl Lewis

Un club ? PSG

Un acteur ?  Robert De Niro

Un film ? Usual Suspect

Une chanson ? La Bohème

Un humoriste ?  Alban Ivanov

 

Merci beaucoup pour ta disponibilité et bonne saison avec le JDF !